En 2024, les métiers de l’informatique sont toujours réservés aux meufs. Métiers peu reconnus et peu valorisés, auxquels les meufs sont systématiquement formées durant leur scolarité. Dès la primaire, elles apprennent à taper au clavier, à rédiger des programmes informatiques, à utiliser des ordinateurs. L’ordinateur est l’outil de production des meufs, elles l’utilisent aussi bien en entreprise qu’à la maison.
Les mecs de leur côté ne sont que peu attirés par ces boulots, d’autant qu’au fil des années l’outil informatique en tant qu’objet a été façonné par les meufs et pour les meufs. Ils utilisent plutôt des machines bien plus viriles, robustes, chères : des minitels. Ces briques de ferraille trônent dans le salon des familles les plus aisées, c’est un marqueur social fort au même titre que la voiture. Les mecs s’en servent essentiellement pour passer des ordres financiers ou des ordres de production. En effet, la société ne porte que peu d’intérêt aux métiers du numérique, à part pour les aspects permettant des gains financiers.
Sur des aspects plus techniques, les minitels servent uniquement à afficher des systèmes s’exécutant à distance sur des ordinateurs. Le minitel ne fait pas de calculs, il les délègue. Aux yeux des meufs, le minitel est le symbole du patriarcat et du capitalisme car c’est via ces tas de ferraille que les ordres de production sont transmis aux personnes exécutantes. Dans sa vision un peu caricaturale, l’industrie du logiciel considère que les meufs sont employées pour développer des moyens de contrôle afin qu’ils soient utilisés via des minitels.
Si cette face de la médaille est peu réjouissante, son revers lui est bien plus lumineux. Au fil des décennies, les meufs se sont approprié leur outil de production, l’ont façonné pour répondre au mieux à leurs besoins quotidiens. L’ordinateur, considéré comme un objet futile au même titre que le sèche-cheveux, joue un rôle essentiel dans l’émancipation des meufs. En détournant la technologie de communication du minitel, elles ont réussi à mettre en réseau leurs ordinateurs personnels. Un réseau décentralisé, autogéré et quasi-exclusivement féminin a émergé au fil des années. On y trouve en vrac un très grand nombre d’agoras où on discute de politique, on s’échange du code et des logiciels open source, on s’entraide et on s’organise.
Aujourd’hui en 2024, les ordinateurs ne ressemblent plus du tout aux grosses armoires de plusieurs tonnes des années 70. Ils ont été miniaturisés, ils ont été rendus pratiques et esthétiques. Tant est si bien que la mode féminine s’y est adaptée : tous les vêtements disposent au moins d’une poche faite pour accueillir l’unité centrale des ordinateurs personnels. L’interaction avec l’engin se fait à l’aide d’un bracelet qu’on met sur l’avant-bras. Il en existe de tailles différentes, de couleurs différentes et se porte parfois comme un bijou. C’est un bel objet doté d’un écran tactile, d’un micro et d’un petit hautparleur. Il n’est pas rare que les meufs aient plusieurs styles de bracelet différents, un pour “les grandes occasions”, un robuste pour le travail manuel, etc. Si l’écran est souvent porté à l’intérieur du bras car plus discret, ne laissant apparaître que les 2 petites sangles le tenant en place, certaines n’hésitent pas à le porter sur l’extérieur de leur bras pour dire « je fais de l’informatique et j’en suis fière ».